Deux responsables des services secrets turcs (MİT), arrêtés par le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) ont avoué les planificateurs de l’assassinat de trois femmes kurdes à Paris.

L’agence de presse kurde ANF a publié mercredi 10 janvier les aveux de ces deux responsables importants du MIT. Ils ont dévoilé les noms et les fonctions des planificateurs et ceux qui ont donné l’ordre, ainsi que le rôle de l’assassin présumé d’Omer Guney, mort en décembre 2016 dans une prison français dans des conditions qui demeurent floues.

DEUX AGENT IMPORTANTS DU MIT ARRETES PAR LE PKK

Les noms et les fonctions au sein du MIT de deux agents turcs ont été dévoilés le 3 janvier par le PKK. Il s’agit de Erhan Pekcetin et Aydin Gunel.  Le premier est le chef des actions anti-terroriste à l’étranger, la branche la plus stratégique du MIT, tandis que le deuxième est le chef des ressources humaines.

Ils ont été arrêtés le 4 août 2017 au Kurdistan irakien lors d’une opération spéciale menée par des combattants du PKK. Ils étaient en train de planifier des assassinats contre les dirigeants du PKK, selon une déclaration de cette organisation. Les images du moment de ces arrestations ont également été publiées par l’agence kurde ANF.

Selon le PKK, les deux responsables importants du MIT ont avoué l’implication directe de l’Etat turc dans l’assassinat des trois militantes à Paris le 9 janvier 2013. La mort dans un hôpital parisien de l’assassin présumé de ce crime politique avait été annoncé le 17 décembre 2016, soit quelques semaines avant le début du procès qui était prévu en janvier.  Aucune déclaration officielle n’a été faite sur cette mort subite. L’assassin présumé souffrait d’une tumeur cérébrale, salon des sources proches du dossier. Mais il s’agit d’une mort programmée pour certains.

L’ORDRE DE MISSION

Les aveux de deux responsables du MİT confirment notamment un « ordre de mission » du MIT pour Omer Güney et un enregistrement vocal de trois hommes dans lequel ils parlent des projets d’assassinat contre certains responsables kurdes en Europe, notamment contre Sakine Cansiz, l’une des fondatrices du PKK, tuée à Paris.  L’ordre de mission a été fuité le 14 janvier 2014. Deux jours plus tôt, le 12 janvier, l’enregistrement vocal a été posté sur YouTube. Les deux preuves se trouvent aussi dans le dossier du juge d’instruction antiterroriste Jeanne Duyé.

L’ordre de mission est signé par quatre responsables du MIT : O. Yüret, U.K. Ayık, S. Asal ve H. Özcan.

Selon les aveux de Erhan Pekçetin, il s’agit de ;

-Uğur Kaan Ayık, qui était alors le chef de la division des actions anti-terroriste à l’étranger

-Oguz Yüret, directeur de la branche chargée des opérations

-Ayhan Oran, membre de la branche des opérations.

Quant à Sabahattin Asal,  il est considéré comme planificateur de l’assassinat contre trois femmes kurdes. Il faisait partie de la délégation de l’Etat turc qui menait des négociations avec le leader kurde Abdullah Ocalan, emprisonné depuis 1999 sur l’ile d’Imrali.  Asal est l’homme stratégiques de Recep Tayyip Erdogan, selon l’agence ANF. Il est le bras droit de Hakan Fidan, chef du MIT. C’est lui qui déterminait la composition de la délégation turque qui participait aux négociations.

LES BILLETS D’AVION D’OMER GUNEY ACHETES PAR LE MIT

Erhan Pekcetin dit connaitre les personnes qui parlent des projets d’assassinat dans l’enregistrement vocal. « La rencontre avec Omer Guney a eu lieu dans un hôtel à Ankara », souligne le responsable du MİT. Le billet d’avion retour d’Omer Guney a été acheté par une agence du MIT, qui serait situé dans le quartier de Yenimahalle dans les logements du MIT à Ankara.

Pour Erhan Pekcetin, une décision d’assassinat si sensible ne peut pas être prise sans l’approbation de Erdogan.  Selon lui,  l’ordre de mission doit monter jusqu’au patron du MIT, puis au président de la Turquie. « Parce que c’est un sujet sensible qui peut poser des problèmes au niveau international » affirme-t-il.

LES FONCTIONS ACTUELLES DES « PLANIFICATEURS »

Aydin Günel fait des aveux sur les fonctions actuelles des planificateurs de l’assassinat :

-Oğuz Yüret, chef du département du MIT dans la province de Van, une ville kurde.

-Uğur Kaan Ayık, chef des actions spéciales.

-Sabahattin Asal, vice-président stratégiques du MIT.

LE PKK : ERDOGAN EST RESPONSABLE DES ASSASSINATS

Selon Besê Hozat, la co-président de la KCK, système politique du PKK, «tout est dévoilé » sur l’assassinat des militantes kurdes.  Elle a affirmé que l’Etat français ne peut pas dissimuler la vérité sur l’assassinat de trois militantes. «Les commanditaires sont Erdogan et Hakan Fidan, chef du service secret turc MIT »

La visite d’Erdogan à Paris, le 5 janvier, est un aveu de l’implication de la France dans l’assassinat de trois femmes kurdes, selon elle. « Les services de renseignements français sont impliqués dans ces assassinats (…) Omer Guney a été tué alors qu’il était sous la responsabilité de la France. »

« Si Macron veut vraiment mener une lutte contre le terrorisme, il doit alors lutter contre l’AKP. Il devait avoir honte d’accueillir Erdogan. C’est un outrage contre le peuple Kurde » a-t-elle déclaré.