Le nouveau coronavirus a révélé presque tous les maux de notre époque. Nous avons vu à la fois le passé, le présent et les enjeux de l’avenir. Va-t-on tirer les leçons nécessaires de tout ce qui s’est passé devant nos yeux comme une pellicule cinématographique ? D’où vient le problème et comment sortir de la spirale des crises ?

Dès la première apparition officielle du nouveau coronavirus en décembre 2019 dans la ville de Wuhan en Chine, le monde a, de nouveau, assisté à une catastrophe planétaire, mais aussi à des secrets d’État, des manipulations, à la répression et à l’incapacité des dirigeants. Le virus a également provoqué ou accéléré de nouvelles crises à la fois économiques et sociales. On parle désormais de l’existence des crises au sein même de la crise du Covid-19. 

Si des centaines de milliers de personnes sont mortes en lien avec le nouveau coronavirus, on ignorait toujours à ce jour quand et comment le virus a infecté l’homme. Le monde continue de poser des questions sur l’origine et les causes du virus, ainsi que sur l’avenir de l’humanité, les travaux scientifiques et les réponses des autorités contre le Covid-19. 

Pendant tout ce temps, la Chine est accusée d’avoir dissimulé l’épidémie ; l’Iran, la Russie et la Turquie sont accusés de manipuler le bilan du Covid-19. Certains, comme le président américain, ont tenté de minimiser, voire ridiculiser l’impact de nouveau coronavirus. Les théories de complots ont gagné les réseaux sociaux. Le vrai et le faux ont souvent changé de place. 

Ainsi, nous avons vu le bombardement de fake-news qui s’est révélé dangereux pour la vie humaine, mais aussi pour les démocraties. Certains dirigeants à l’image du président des États-Unis Donald Trump et de son homologue brésilien Jair Bolsonaro ont refusé de voir la réalité et ont eu recours à des accusations qui restent infondées scientifiquement. 

D’autres ont préféré profiter de cette situation pour renforcer les mécanismes de contrôle sur leurs populations, comme en Chine où la surveillance s’est accélérée avec l’utilisation massive de nouvelles technologies;  en France où des drones ont surveillé pendant un temps les zones interdites d’accès à Paris, avant d’être interdits par la Justice; en Turquie où le gouvernement a renforcé la répression visant notamment les Kurdes en arrêtant de nombreux dirigeants du parti HDP et révoquant deux députés kurdes, ainsi que plusieurs maires HDP dans la région kurde. En profitant de la pandémie, les autorités turques ont également libéré les mafieux, dont le chef de la mafia ultranationaliste Alaattin Cakici, et les auteurs de viols, tandis que des journalistes, des politiciens, des féministes et des militants de la société civile continuaient de rester en prison. 

En Corée du Sud, les autorités ont mis en œuvre des capteurs alertant la température d’un habitant présentant un danger pour la collectivité ; en Pologne, les habitants ont dû choisir entre l’installation d’une application de vérification de confinement sur leur téléphone portable et des visites inopinées de la police à leur domicile. 

On a vu d’une part la poursuite et le renforcement de la répression, d’autre part les faiblesses du système néolibéral dans le monde entier. On a compris que le monde n’était pas préparé à une telle catastrophe, au contraire, malgré les avertissements depuis des années venant du monde de la science et de la société civile, les services essentiels comme les hôpitaux avaient été systématiquement détruits pour le profit. 

Or, la crise sanitaire était prévue depuis longtemps ; le monde scientifique alertait sans cesse, de nombreux experts, anticapitalistes, écologistes, activistes, académiciens, journalistes ou même plusieurs scénaristes de films montraient du doigt les dangers qui nous attendaient. La question n’a jamais été si nous allons vers des catastrophes, mais plutôt quand ! 

Le nouveau coronavirus a ainsi révélé une fois de plus nos relations destructrices avec la nature et les animaux depuis des milliers d’années. D’une part le réchauffement climatique, d’autre part des virus d’origine animale, le monde continue d’être exposé à de nouvelles crises que ce soit sanitaire, écologique ou social.

Le virus n’a pas fait non plus disparaître les frontières sociales, au contraire les inégalités se sont renforcées et devenues plus visibles. « Partout, le confinement a renforcé les inégalités entre les travailleurs » qualifiés à même de télétravailler et les moins qualifiés, « souvent en première ligne » dans la lutte contre la pandémie, avait affirmé le 10 juin le chef économiste de l’OCDE, Laurence Boone. De nombreuses organisations continuent d’alerter sur la famine qui a atteint des proportions record dans certaines régions. Le nombre d’enfants mal nourris pourrait atteindre 2,4 millions d’ici la fin de l’année au Yémen, selon le Fonds de l’ONU pour l’enfance (UNICEF). 

Le 23 juin, à l’occasion de la publication d’un rapport mondial sur l’éducation, l’Unesco soulignait que la pandémie de Covid-19 pourrait fragiliser encore davantage les traditionnels laissés-pour-compte de l’éducation. Le rapport parlait des pauvres, des fillettes et des handicapés. Le même jour, l’UNICEF mettait en garde : les perturbations provoquées par la pandémie pourraient pousser jusqu’à 120 millions d’enfants dans la pauvreté en Asie du Sud au cours des six prochains mois. Pour les Nations Unies et le Forum économique mondial, la crise devrait faire basculer un demi-milliard de personnes dans la pauvreté.

De nombreux acteurs sociaux craignent d’une accentuation de la fracture sociale et de l’exacerbation des inégalités après le confinement. Plus besoin de chiffre pour voir cette réalité de notre époque : les plus pauvres sont davantage touchés par le virus, et en meurent davantage. On entend les mêmes avertissements pour l’après Covid-19. 

Toutes les indications montrent que le monde est entré dans une crise économique sans précédent. Le PIB s’est effondré dans tous les pays, le chômage a explosé. « À la fin de 2021, la perte de revenu dépassera celle de toutes les récessions précédentes au cours des cent dernières années sauf en période de guerre, avec des conséquences terribles et durables pour les populations, les entreprises et les gouvernements », avait souligné le 10 juin la chef économiste de l’OCDE. 

Le Covid-19 nous a offert une image complète sur les maux de notre époque. On a vu que toutes les crises qui détruisaient notre présent et menaçaient notre avenir étaient liées les unes aux autres ; les virus, l’exploitation, la pauvreté, l’inégalité, la destruction de la nature, le réchauffement climatique, le néolibéralisme, le patriarcat…

Oui, le patriarcat. Le virus a montré une fois de plus le fléau de la violence patriarcale envers les femmes qui s’est accentué lors du confinement. Début du mois de mars, l’OMS Europe lançait une alerte : les services d’urgence à travers l’Europe ont enregistré une hausse allant jusqu’à 60% des appels de femmes victimes de violences conjugales pendant le confinement. Début avril, le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres reconnaissait que les mesures de confinement et de quarantaine risquaient de « piéger les femmes avec des partenaires violents ». 

  • La dégradation de l’écosystème et le développement des maladies 

Le coronavirus a donné assez d’indices pour les causes du problème, mais il a aussi montré le chemin à prendre pour sortir des crises actuelles. Écoutons alors les acteurs de la société civile. 

D’abord, un éclairage sur le virus aux yeux des écologistes. Pour beaucoup, le lien entre le virus et la destruction de la nature se manifeste clairement. Alors, de ce point de vue, quels sont les facteurs qui nous ont conduit vers cette crise sanitaire ? 

« Dans le cas précis de l’épidémie de Covid-19, le lien avec la destruction d’un écosystème n’est pas avéré. En revanche, il est indéniable que la dégradation des écosystèmes et de la biodiversité favorise le développement de maladies infectieuses d’origine animale » dit Anne-Françoise Moens, attachée de presse chez Greenpeace Belgique. 

« En effet, certaines activités humaines, comme la déforestation ou l’agriculture industrielle, détruisent des écosystèmes naturels. Ce faisant, elles favorisent la mise en contact des êtres humains avec les animaux sauvages et les virus qu’ils sont susceptibles de porter, augmentant ainsi le risque de contagion des humains », développe-t-elle. 

Pour elle, la solution n’est évidemment pas d’éradiquer la faune sauvage, mais bien de la protéger, tout comme son habitat naturel. « Car plus la biodiversité et les écosystèmes naturels seront protégés, moins il y aura de risques d’épidémies. »

  • Si nous ne changeons rien…

Que faut-il attendre si l’humanité ne parvient pas à prendre des mesures nécessaires pour protéger le climat, la nature et les animaux ? « Continuer sur la voie de l’industrialisation et de la libéralisation de notre agriculture serait un non-sens. Il est temps de doter (…) d’une agriculture résiliente, capable de mieux absorber les chocs sanitaires, mais aussi d’assurer une production alimentaire durable tant socialement qu’écologiquement, garantissant l’accès à une alimentation saine pour tout·es. Les politiques publiques doivent orienter l’agriculture dans cette voie. Si nous ne changeons rien, nous allons droit dans le mur », souligne-t-elle.  

Alors, quelles mesures peuvent-elles être durables pour changer le don ? Voici la réponse d’Anne-Françoise Moens : « Changer nos habitudes de consommation, favoriser les circuits courts, mais aussi de renforcer les liens entre agriculteurs et agricultrices et leurs client·es. Ne plus utiliser de soja importé comme nourriture animalière. L’importation de certaines denrées pour alimenter notre système agricole et alimentaire, comme le soja pour l’alimentation animale, contribue à la déforestation. Or la destruction d’habitats naturels peut favoriser l’apparition de zoonoses. »

Pour elle, il faut à la fois un changement de mentalité et un nouveau système de gouvernance. « Un changement de mentalité n’arrivera que si la gouvernance agit dans ce sens », ajoute-t-elle. 

  • Violence faite aux femmes pendant le confinement

Et si on parlait de la violence faite aux femmes pendant le confinement ? Quel rapport avec le virus, d’où vient le problème et quelles solutions ? On sait déjà que la violence contre les femmes a augmenté pendant le confinement. Mais il s’agit bien évidemment d’un problème plus profond et plus grave que le Covid-19. Et il n’y aura pas un vaccin pour venir au bout de cette violence. 

La coordinatrice de Vie Féminine, Céline Caudron attire d’abord l’attention sur plusieurs formes de violence faites aux femmes. « Parmi celles-ci, nous avons surtout constaté une intensification des violences conjugales (au sein du couple ou de l’ex-couple) et dans l’espace public (dans la rue ou sur internet). »

« Les auteurs de violences conjugales étant renforcés dans leurs stratégies d’isolement de leurs victimes, et les victimes étant limitées dans leurs possibilités de protection et de résistance, les violences conjugales sont ainsi devenues plus intenses (pressions psychologiques et plus de risque de passage aux violences physiques et sexuelles) » poursuit-elle. 

Quelles mesures devaient être prises par les autorités ? « Pendant le confinement, les énormes manquements des pouvoirs publics face à leur responsabilité dans la lutte contre les violences faites aux femmes se sont encore plus faits ressentir. »

Si les régions et communautés ont assez vite réagi, en mettant en place du côté francophone une « task force » qui a permis d’activer des mesures temporaires, rien n’a été activé au niveau fédéral en Belgique, dénonce-t-elle. 

  • Les femmes doivent se débrouiller

Pour Céline Caudron, étant donné le manque d’investissement des pouvoirs publics face à ce qui est pourtant une responsabilité collective, les femmes doivent se débrouiller comme elles le peuvent. « Des réseaux de solidarité se créent aussi entre femmes, d’abord pour maintenir le lien social, savoir qu’on n’est pas seule, trouver à qui parler, se sentir plus forte, mais aussi pour proposer une aide matérielle, un hébergement, de l’aide avec les enfants, de l’aide dans les démarches administratives et judiciaires… Il faut aussi que les hommes se responsabilisent collectivement pour éviter de devenir ou de continuer à être auteur de violences machistes ; à ce niveau, on n’est nulle part. »

De nombreuses organisations de femmes dont Vie Féminine insistent pour que des leçons soient tirées de ce que nous vivons aujourd’hui et plaident pour une véritable politique globale, cohérente et coordonnée de lutte contre les violences faites aux femmes, financée en conséquence. « Cette politique globale doit aussi inclure une stratégie de prévention primaire qui aide notamment à mieux affronter à l’avenir des situations exceptionnelles comme celle-ci », soulignaient-elles dans une lettre contenant une série de mesures à l’attention des Ministres membres de la Conférence Interministérielle sur les droits des femmes, le 1er avril. 

  • Une tempête parfaite

Comme on constate dans les chiffres, dans nos vies quotidiennes, mais aussi dans la parole des dirigeants, des experts ou des acteurs sociaux, la situation est dramatique et alarmante, car il faut ajouter à la pandémie une crise financière et économique d’ampleur encore inconnue, tout comme l’explosion du chômage, de la pauvreté et de la colère qui gronde partout.  Pour l’historien et sociologue Stephen Bouquin, il s’agit d’une « tempête parfaite » dont on ne peut savoir où elle nous mènera. « La situation a brutalement changé et il faut en prendre toute la mesure », dit-il. 

On entend régulièrement dans la presse que l’économie mondiale subit un choc bien plus grave que la crise de 2008 ou la Grande Dépression des années 1930. Même la patronne du Fonds monétaire international (FMI) Kristalina Georgieva a anticipé, début avril, qu’il s’agissait des pires retombées économiques depuis la Grande Dépression. 

« La pandémie du Covid-19 a été l’élément déclencheur d’une crise économique globale qui sera bien plus profonde que celle de 2008 », souligne le sociologue Bouquin. 

L’ampleur de la crise est sans doute énorme, mais cette crise était-elle vraiment inattendue ? « Tous les éléments favorisant cette crise étaient déjà présents avant la pandémie. Non seulement une suraccumulation financière avec des bulles spéculatives, un endettement phénoménal, mais aussi et surtout une profitabilité insuffisante ainsi que des déséquilibres commerciaux au sein des pays de l’OCDE. En provoquant une mise à l’arrêt des économies, le Covid19 a interrompu le cycle d’accumulation, ce qui correspond en quelque sorte à un infarctus pour le système capitaliste. Les banques centrales ont injecté des sommes importantes dans l’économie, pour soutenir la consommation et permettre aux entreprises endettées de continuer à payer, même avec retard, leurs créanciers. » dit Stephen Bouquin. 

Pour l’historien, le Covid-19 n’est pas un ‘cygne noir’, une sorte d’accident imprévu qui déclenche une crise. « Il n’est même pas la maladie que personne n’a voulu voir venir, bien au contraire. En 2018, le groupe d’expertise Blueprint de l’OMS a publié un rapport sur le danger d’une pandémie. À juste titre, car depuis 2003 les épidémies se multiplient : SRAS, MERS, H1N1, Ebola, Zika et Chikungunya. Pour les experts de l’OMS, il était urgent de mettre en place un système de veille à l’égard du risque de pandémie, afin de contenir celle-ci avant qu’elle ne déclenche une réaction en chaîne » poursuit-il. 

  • Le véritable grand problème

L’une des questions fondamentales qui s’imposent désormais et, en réalité depuis très longtemps : la crise sanitaire offre-t-elle vraiment l’occasion de rompre avec le modèle qui a favorisé l’apparition du coronavirus et sa propagation ?

« La crise systémique offre certainement l’occasion de rompre avec le capitalisme prédateur et destructif. La pandémie n’est qu’un élément parmi d’autres. Elle est un épiphénomène, un produit dérivé si on veut, de la crise écologique », affirme l’historien Bouquin, pour qui il faut aussi comprendre la pandémie comme un produit dérivé de la crise économique. 

Le 4 juillet, la présidente de la Banque centrale européenne (BCE) Christine Lagarde admet aussi que cette crise « va être une accélération de transformations qui étaient déjà latentes dans nos économies ».

« En fabrication, en travail, en commerce, ce que nous venons de vivre va accélérer les transformations et va entraîner probablement une évolution vers un mode vie plus soutenable et plus écologique », ajoutait-elle. 

Et si on parlait d’un problème plus grand et plus profond ? Les crises sanitaire, climatique, économique et sociale ne sont-elles liées à un seul problème ; le capitalisme ? Pour le sociologue Bouquin, la démultiplication de risques de pandémie n’est pas une vengeance de la nature. « La biodiversité est en chute libre dans bon nombre de territoires, la crise climatique s’accélère avec un dérèglement des saisons, des sécheresses prolongées, une fonte du permafrost, etc. Cette crise des écosystèmes terrestres impose des coûts inattendus au capital et il exprime en quelque sorte la rencontre du capital avec lui-même. »

« La pandémie est la à la fois une expression de la crise écologique et le résultat de l’action du capitalisme. En mettant à l’arrêt l’économie mondiale, elle provoque un arrêt du cycle d’accumulation, ce qui provoque ensuite une récession monumentale » développe t-il. 

Par conséquent, «la crise écologique et la pandémie du Corona démontrent que ce n’est pas un certain capitalisme – disons néolibéral– qui pose problème, mais bien le capitalisme en tant que tel »

  1. Comment sortir de la spirale des crises ?

Comment sortir alors de la crise systémique ou des crises qui s’empilent les unes sur les autres ? « Il n’y a pas 36 solutions. Une solution néo-keynésienne, un autre capitalisme, sera toujours néfaste pour l’écosystème. Le capitalisme a besoin d’un extractivisme et d’une marchandisation des communs qui nous restent. Le capitalisme vert existe, mais il n’est pas à même de résoudre la crise écologique, au contraire, il la parasite. Mais cette crise n’est pas source de profits, juste de surcoûts croissants qui ont été masqués pendant des décennies. Sur le plan social, là aussi, la résolution de la crise est de nature anticapitaliste. Il faut généraliser le droit au revenu, généraliser le salaire universel et la seule institution à même de faire cela, c’est la sécurité sociale. Pour y arriver, il faudra bien exproprier la majorité des capitalistes. Sur le plan sociétal, la solution de la crise passe par une priorité absolue aux besoins sociaux, une planification écologique et le développement d’un système productif durable. Tout cela est en train de devenir évident pour de larges secteurs de la population. On ne peut plus continuer comme avant. Il faut tout changer. Là où le bât blesse, c’est que cette prise de conscience intuitivement anticapitaliste n’est pas encore éco-socialiste. Elle n’est pas assez internationaliste non plus. La volonté de relocaliser l’économie est réelle, mais dans la situation actuelle, il faudra continuer d’organiser un échange à l’échelle mondiale. L’autosuffisance alimentaire n’est pas à portée de tous et l’interdépendance des uns par rapport aux autres est devenue bien plus profonde qu’il y a un siècle. Les options politiques à défendre doivent intégrer cette donnée et ne pas verser dans le localisme, une sorte de version nouvelle de la déconnexion. »

Pour lui, « le projet écosocialiste est le seul projet internationaliste à même d’apporter une issue la crise existentielle du capitalocène. » 

« Mais pour devenir contre-hégémonique, il doit s’ouvrir à d’autres options, et développer des actions communes tout en développant un dialogue programmatique. Car les freins sont encore nombreux et on n’avancera pas sans les débloquer » ajoute-il. 

  • Les potentialités d’une révolte mondiale…

Face aux crises, on observe aussi un mécontentement insurrectionnel à travers le monde. Si les mesures de confinement semblaient au début avoir étouffé les révoltes dans plusieurs pays, mais elles n’ont pas tardé a renaître. À la question « Quelles sont les potentialités d’une révolte mondiale ? », la réponse de l’historien Stephen Bouquin est brève : « Elle est déjà là ». Mais il développe : « Tôt ou tard, on risque de connaître une inflation et des crises monétaires, ce qui pour le capital est assez redoutable. Imaginez ce que ça implique pour les actionnaires et les détenteurs de capitaux si leur stock de titres libellés en dollars ou en euros commence à se dévaloriser de plus en plus. Soit la valeur facile se détériore, soit la valeur monétaire se dévalorise. C’est la peur bleue du capital. Pour y remédier, il n’y a qu’une solution, reporter sur le monde du travail sinon sur les voisins les effets de la crise. On va donc connaître une intensification de la lutte des classes menées par le capital et une exacerbation des tensions et conflits inter-étatiques ou inter-impérialistes (…) Il y a d’ores et déjà les mobilisations qui sont d’emblée globales, comme la mobilisation des femmes contre le sexisme et le patriarcat et la vague de révoltes contre la racialisation discriminante, fortement liée à la non-résolution de la question coloniale. Black Lives Matter résonne dans beaucoup de pays et la lutte contre le racisme d’Etat est presque partout présent.»

En attentant, la pandémie de Covid-19 ne semble pas se terminer. « La pandémie n’est pas terminée, même si elle semble connaître un reflux en Europe. Le danger d’une seconde vague est réel (…) Elle est déjà en route, elle sera peut-être moins forte et l’action visant à contenir celle-ci sera peut-être efficace dans certains pays. Si les gouvernements décident de laissez faire le corona, en cherchant à remettre l’économie en marche, les conséquences sanitaires risquent d’être effrayantes » conclut le sociologue. 

Maxime Azadi